est?
tu te souviens, je t'en ai déjà parlé de cette envie que j'ai de partir.
je ne sais où.
je veux aller chercher cette maison. un peu perdues elle et moi, un peu dans les bois. elle n'est pas très grande, tu sais, comme moi en fait, mais il y a juste ce qu'il faut pour s'y sentir bien.
mais j'y suis, moi toute seule. je suis dans le salon tu vois, là où il fait un peu sombre et où j'ai dû placer cette grande lampe sur pieds, là, juste derrière mon gros fauteuil. je vais m'y blottir, avec mon livre, si tu me cherches je vais y rester un peu.
je fais semblant, c'est souvent, je tourne les pages après avoir regardé les mots. semblant parce que sans faire exprès je n'ai rien lu et je sais que je vais devoir recommencer. semblant parce que je pense…
dehors il pleut, il fait un peu froid aussi, tu sens, mais en même temps je me sens réchauffée parce que je suis bien. je n'aime pas trop la pluie tu le sais, mais j'aime cette obscurité qu'elle apporte, quand elle nous enveloppe.
je pense à une journée qui n'existe pas, où je me suis promenée dans le bois juste derrière. il a fait un peu frais. ça me gênait au début mais ce froid sur mes joues, qui anesthésie un peu le bout de mon nez, j'aime, surtout qu'après je vais rentrer au chaud.
c'est comme quand on habitait là-bas et qu'on grimpait aux arbres, qu'on creusait dans la terre pour se cacher. "s'ils attaquent on pourra surgir et défendre la maison". on n'a pas d'armes et on a un peu peur d'étouffer. la terre ça tient chaud, on pourrait s'endormir pour longtemps.
je regarde dehors. il fait sombre alors qu'il n'est pas si tard mais ça sent le soir.
il y a un escalier ou pas?
je crois t'entendre arriver. sur le plancher en bois qui grince ou sur les petits carreaux rouges (tout petits)? dis-moi, je ne me souviens pas.
c'est toi et ça me fait sourire. je vais faire en faux, d'accord, faire comme si je ne t'avais pas entendu pour que tu puisses me faire peur. juste un peu, et que tu fasses "ooohhh…" quand je vais faire une moue boudeuse.
ferme les yeux pour la parenthèse : (et puis après tout, ça n'existe pas alors j'en ai bien le droit, non?)
je voudrais, un après-midi aller prendre le thé avec maman, la voir un peu mais pas trop lui parler. elle ressent trop les fantômes.
oh, c'est déjà dimanche et tu es devant la télé. c'est étrange, ce moment. c'est plutôt le dimanche, les dimanches que j'ai toujours trouvé d'une ambiance particulière, comme si il manquait quelque chose dans ce jour, ou comme s'il y avait quelque chose en trop. c'est peut-être simplement son rapport avec le lundi, je ne sais pas et puis je pense que tu vois ce que je veux dire, non?
donc, oui je disais, la maison. ah, j'ai mis quelque chose à chauffer dans la cuisine, pour tout à l'heure, si tu viens, même si je ne t'espère pas vraiment. je vais plutôt me replonger dans ces lignes et me dire que ça te fera venir plus vite…